Nouvelles règles en matière de responsabilité à partir du 1er janvier 2025 : qu'est-ce qui va changer pour votre entreprise ?

A partir du 1er janvier 2025, le droit belge de la responsabilité prendra un tournant radical. Le nouveau livre 6 « Responsabilité extracontractuelle » du Code civil introduit deux changements essentiels : la suppression de l'interdiction de concours et de la quasi-immunité de l'agent d'exécution. Cette réforme offre aux parties lésées davantage de possibilités d'obtenir des dommages-intérêts, mais elle incite également les entrepreneurs à gérer leurs risques de responsabilité avec encore plus d'attention. Qu'est-ce qui va changer exactement ? Marlies Janssens et Stefanie Claeys, avocates spécialisées en droit des contrats, expliquent les principaux changements et comment vous, en tant qu'entrepreneur, pouvez vous préparer au mieux à ces nouvelles règles du jeu.
Franchir la barrière : abolir l'interdiction de concurrence
Jusqu'à présent, la responsabilité contractuelle et extracontractuelle ne pouvait pas être combinée. Lorsqu'un contrat existait entre deux parties, la personne lésée était limitée à la responsabilité contractuelle.
À partir du 1er janvier 2025, l'introduction de l'article 6.3 du code civil mettra fin à cette interdiction de concours : une partie lésée pourra obtenir des dommages-intérêts à la fois contractuels et extracontractuels. Cela ouvre la porte à des demandes supplémentaires dans des situations où la partie lésée peut demander une indemnisation non seulement sur la base d'un contrat, mais aussi sur la base de la norme générale de diligence.
Attention: même avec la responsabilité concurrente, les règles de base de la responsabilité extracontractuelle restent inchangées : par exemple, il doit y avoir une faute, un dommage et un lien de causalité.

Fin de la quasi-immunité pour les agents d'exécution
Un autre changement important qui interviendra en 2025 est la suppression de la quasi-immunité pour les agents d'exécution. Un agent d'exécution est une personne qui contribue à l'exécution du contrat, par exemple les administrateurs, les employés ou les sous-traitants. Jusqu'à présent, ces agents d'exécution bénéficiaient d'une quasi-immunité, ce qui signifiait qu'ils ne pouvaient pas être tenus responsables par la partie contractante de leur mandant. Il existe une exception importante à ce principe, à savoir lorsque l'erreur de l'agent d'exécution viole non seulement le contrat, mais aussi la norme générale de diligence et que cette erreur ne cause qu'un dommage extracontractuel. Cette situation ne se produisant qu'exceptionnellement, l'immunité de l'agent d'exécution n'est qu'une « quasi-immunité ».
À partir de 2025, cette protection cessera d'exister : les parties lésées pourront poursuivre directement les agents d'exécution pour les erreurs commises lors de l'exécution d'un contrat.
Qui peut s'adresser à qui ? Un exemple pratique expliqué
Supposons qu'un constructeur passe un contrat avec un entrepreneur général pour la construction d'une maison. Pour la pose du toit, l'entrepreneur général fait appel à un sous-traitant (et donc à un agent d'exécution). Malheureusement, la toiture est posée de manière amateur et s'envole à la première tempête.
Jusqu'à présent, le maître d'ouvrage ne pouvait, dans ce cas, que poursuivre l'entrepreneur principal en dommages et intérêts, sur la base du contrat qui les liait. Le sous-traitant, malgré sa faute, restait hors de cause.
À partir du 1er janvier 2025, cela changera : le maître d'ouvrage pourra en effet tenir le sous-traitant directement responsable des dommages résultant de la mauvaise exécution du contrat.
Comment votre entreprise se prépare-t-elle aux nouvelles règles en matière de responsabilité ?
Avec l'abolition de l'interdiction de concurrence et de la quasi-immunité, le législateur belge introduit des changements importants à partir de 2025, entraînant une augmentation significative du risque de responsabilité. En effet, si la responsabilité contractuelle est normalement encadrée et limitée par le contrat, la responsabilité extracontractuelle n'est pas automatiquement limitée. En tant qu'entrepreneur, vous devrez donc prendre des mesures à cet égard. Une préparation minutieuse et un contrôle opportun de vos accords ne sont donc pas un luxe inutile.
Comme la plupart des règles du nouveau Livre 6, la combinaison de la responsabilité extracontractuelle, contractuelle et de l'agent d'exécution ne relève que du droit supplétif. Cela signifie qu'en tant que chef d'entreprise, vous avez la possibilité d'y déroger dans votre contrat afin de gérer efficacement vos risques. Voici quelques possibilités d'intervention contractuelle :
1 | Introduire l'interdiction de concurrence
Une première modification importante consiste à choisir d'inclure explicitement l'interdiction de concurrence dans le contrat, par exemple dans une clause distincte ou dans les conditions générales. Il s'agit d'un élément indispensable pour une couverture complète des risques, en particulier pour les contrats comportant des risques élevés en matière de responsabilité.
2 | Contrat entre le co-contractant et l'agent d'exécution
Si vous (1) agissez vous-même en tant qu'agent interprète ou (2) faites fréquemment appel à des agents interprètes, vous pouvez choisir de vous protéger ou de protéger vos agents interprètes contre toute responsabilité. Cela peut se faire à deux niveaux : d'une part, vous pouvez modifier votre propre contrat avec le mandant, souvent dans vos conditions générales. D'autre part, vous pouvez inclure dans le contrat avec votre agent d'exécution, par exemple, une garantie de bonne fin. Il s'agit d'une promesse exécutoire faite à votre agent d'exécution qu'il ne pourra pas être poursuivi par des tiers, ou que vous interviendrez d'une autre manière en cas de dommages causés par lui.
3 | Limitation de la responsabilité des employés et des directeurs
Les agents d'exécution étant directement responsables de leurs erreurs à partir de 2025, il est préférable, en tant que chef d'entreprise, de réfléchir à temps à une protection contractuelle contre les risques pour les employés, les directeurs, les gestionnaires et les représentants. Cela peut se faire, par exemple, en concluant un accord d'indemnisation ou en réintroduisant la quasi-immunité, de sorte que les réclamations de tiers contre les agents d'exécution soient exclues ou subordonnées aux réclamations contre votre entreprise. La création d'une société de gestion offre également une protection supplémentaire contre les actions en responsabilité personnelle, tout comme la souscription d'une assurance responsabilité civile des administrateurs.
Droit de la responsabilité 2025 : nouvelles possibilités de personnalisation des contrats
L'explication ci-dessus ne laisse aucun doute : à partir du 1er janvier, le nouveau Livre 6 du Code civil remet en question certains principes de responsabilité bien établis. Outre les défis évoqués, cette nouvelle législation offre également aux entrepreneurs l'occasion de renforcer leur position juridique. Vous avez des questions sur la modification de vos contrats ou de vos conditions générales ? Nos juristes examinent vos contrats avec minutie et vous conseillent par expérience afin que votre entreprise soit bien préparée à cette nouvelle réglementation.
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